1905 : Initialement prévue pour boucher une page blanche de la revue, l'histoire, écrite par Jacqueline Rivière née Jeanne Joséphine Spallarossa (1851-1920) , rédactrice en chef du magazine La Semaine de Suzette, et dessinée par Joseph Pinchon (1871-1953), et qui relatait une bévue commise par la bonne bretonne de l'auteur, rencontra un tel succès que de nouvelles planches paraîtront régulièrement, toujours en guise de remplissage ponctuel.
Toutefois, à partir de 1913, Bécassine, dont on apprend à cette occasion le vrai nom (Annaïck Labornez) deviendra l'héroïne d'histoires beaucoup plus structurées, toujours dessinées par Pinchon, mais dont les scénarios seront l'œuvre de Caumery, pseudonyme de Maurice Languereau (1867-1941), neveu et associé d'Henri Gautier dans la maison d'édition Gautier-Languereau, éditrice de la Semaine de Suzette.
De 1913 à 1950 sont parus plusieurs aventures de Bécassine. D'autres albums et recueils sont parus après la mort de Pinchon en 1953
Survenue trois ans avant Les Pieds Nickelés, la naissance de Bécassine est aussi celle de la bande dessinnée moderne, la transition entre les histoires illustrées et la vraie bande dessinée. Son style de dessin, au trait rond, vif et moderne, inspirera une ligne graphique, la ligne claire, dont 25 ans plus tard Tintin sera le plus beau fleuron.
Tombée un peu dans l'oubli, Bécassine reviendra sur le devant de la scène grâce au tube de Chantal Goya « Bécassine, c'est ma cousine » vendu à plus de 3 millions d'exemplaires en 1979.
Depuis, et en réaction, le chanteur et guitariste breton Dan Ar Braz, qui a représenté la France à l'Eurovision en chantant en breton, a mis à son répertoire une chanson où il dément pour son compte : Bécassine, ce n'est pas ma cousine!
À la même époque l'émission de télévision Le Bébête show présentait Jean-Marie Le Pen sous la forme d'une marionnette parodiant l'héroïne : « Pencassine ».
Bécassine et la Bretagne
Ce personnage de Bécassine est souvent mal perçu par les Bretons.Le Trésor de la langue française écrit à propos du terme « bécassine » : "fig., péj. Femme stupide ou ridicule "
A l'entrée « Bécassine », le dictionnaire français Larousse donne comme acception familière : « Jeune fille sotte ou naïve », proche de celle de l'encyclopédie Encarta : « jeune fille un peu niaise ».
On remarquera cependant que le Grand Larousse encyclopédique en 10 volumes de 1960 ne donne à « bécassine » aucune autre définition que celle de l'oiseau et pour « Bécassine » écrit simplement : « Type de bonne bretonne, brave mais étourdie, créée par le dessinateur et peintre Joseph Pinchon »
Pour certains, le personnage créé par Émile-Joseph-Porphyre Pinchon représentait la bonne « provinciale » telle que la voyaient les élites bourgeoises parisiennes et, sur la base de son costume, elle serait plutôt Picarde. C'est en 1913 que la scénariste d'origine madame Rivière est remplacée par monsieur Languereau, qui fit du personnage une Finistérienne.
Un groupe de Bretons agit le 18 juin 1939 au Musée Grévin à Paris, pour détruire la statue en cire du personnage
De nombreux universitaires montrent que le personnage de Bécassine témoigne de la vision négative que la bourgeoisie parisienne avait du menu peuple breton. James Eveillard et Ronan Dantec définissent Bécassine comme l'« incarnation du mépris dont les Bretons ont souvent souffert ». Alain Croix et Christel Douard parlent littéralement de « syndrome de Bécassine » quant à eux.
Elle est habituellement dessinée sans bouche... « pour ne pas protester, estimèrent nombre de militants bretons ».
Dans La Bretagne, François de Beaulieu voit dans ce personnage un « mélange de bonté et de bêtise entêtées qui puise ses racines dans le vieux mythe de la "Bretagne arriérée mais pure ».
Selon lui, dans les années 1970, l'image de Bécassine change, comme par exemple sur une affiche d'Alain Le Quernec qui la présente le poing dressé, protestant contre les marées noires répétitives qui souillent alors les côtes bretonnes.
Henri Boyer, professeur en sciences du langage à l'Université de Montpellier III, indique que les différents épisodes de Bécassine fondent cependant « sa réputation de simple d'esprit ».
« L'image du Breton têtu, courageux, borné, plouc, alcoolique s'impose. Le plus grave est sans doute la manière dont les Bretons ont eux-mêmes intégré cette image qui leur est renvoyée, il est vrai, de multiples façons ».
En 1995, à l'occasion des 90 ans du personnage, le journal France-Soir se demande à propos de Bécassine : « Est-elle devenue moins gourde ?».
Dans un ouvrage de vulgarisation paru en 2003, l'historien Jérôme Cucarull explique que l'Histoire économique de la Bretagne a récemment tiré profit d'une recherche fructueuse qui a abouti notamment à rectifier nettement l'image qui prévalait jusqu'« il n'y a pas encore si longtemps », « d'une Bretagne rurale arriérée dont Bécassine pouvait constituer un symbole commode ».
La poste française sort en avril 2005 un timbre-poste à l'effigie de Bécassine, à l'occasion du centenaire de la parution de sa première (més)aventure .
Mais à d'autres occasions, les Bretons la reprennent à leur compte. Par exemple le magazine de bandes dessinées rennais Frilouz, dont le numéro 0, partiellement repris dans le numéro 8 (février-mars 1984), était un « Spécial Bécassine ».
C'est contre cette vue négative que s'élève Bernard Lehembre dans Bécassine
. Un article de l'Express fait observer lui aussi qu'« elle a escaladé les Alpes, conduit des voitures et piloté un avion. Elle s'est même essayé au cinéma, moderne et trépidante, nonobstant sa coiffe blanche et son parapluie rouge » et mentionne que Françoise Dolto avait signalé ses albums « comme des modèles d'une éducation moderne et d'une compréhension de la psychologie enfantine ».
La situation est en fait très compliquée. Il faut remarquer que ceux qui parlent de racisme dans Bécassine ne citent jamais d'exemples réels
. Il faut convenir qu'au début du XXe siècle les histoires bretonnes tiennent la place des histoires belges de naguère.
C'est la brave fille naïve à qui son ignorance de la vie parisienne ne cesse de faire faire des faux-pas. C'est ainsi qu'elle ne sait pas ce qu'est un homard ; sa maîtresse lui a simplement dit que c'est tout rouge et que, quand il arrivera, il faudra le mettre à l'office. Elle envoie donc à l'office le colonel en uniforme rouge que la marquise de Grand Air avait invité à déjeuner.
En réalité, ce sont tous les paysans qui, à l'époque, sont considérés comme des incultes par la bourgeoisie
Seulement, le succès du personnage incite les éditeurs à en faire une héroïne à part entière
. Dans L'Enfance de Bécassine; les erreurs qu'elle commet sont celles d'une petite fille naïve et qui a trop bon cœur
Il semble que les auteurs se soient à l'occasion un peu renseignés sur la Bretagne et c'est au contraire un aspect sympathique qu'ils en présentent avec le village de Clocher-les-Bécasses.
Arrive la guerre au cours de laquelle Bécassine est en quelque sorte mobilisée pour combattre l'adversaire.
Nous la voyons servir de guide à des gens de son village qui désirent visiter l'Exposition de Paris ; là encore ces provinciaux en costume breton vont connaître des mésaventures liées à leur ignorance de la vie parisienne.
Mais un autre côté est à considérer : la Guerre a changé toutes les données dans la vie sociale, les petites lectrices s'en rendent compte en entendant parler leurs parents et la Semaine de Suzette essaie d'en tenir compte.
Tandis que la marquise de Grand Air commence à éprouver des difficultés financières , les paysans de Clocher-les-Bécasses se sont maintenant enrichis et ils ont envie de visiter Paris. Le renversement est significatif.
Albums originaux de J.-P. Pinchon
De 1913 à 1950 sont parues, dans le périodique illustré La Semaine de Suzette, 27 aventures complètes de Bécassine
Les aventures ont été reprises dans des albums normalement parus à la fin des publications sur le magazine.
Cette suite historique comporte aussi trois « hors série » qui sont paru comme albums mais qui n'ont jamais été publiés dans la Semaine de Suzette en raison du fait que ce ne sont pas des aventures.
Les premières éditions des album comptent 64 pages avant 1937, mais seulement 48 après (le premier album "court" est Bécassine cherche un emploi).
Cependant, certains rééditions des années '50-'60 ont été abrégés en 48 pages. Les hors-série sont encore plus courts.
La liste suivante présente les titres des album de Bécassine par année de première parution de l'aventure, et la date de parution de l'album (parfois distante de plusieurs années):
N. | Titre | An album |
1 | L'Enfance de Bécassine | 1913 |
2 | Bécassine en apprentissage | 1919 |
3 | Bécassine pendant la Guerre | 1916 |
4 | Bécassine chez les Alliés | 1917 |
5 | Bécassine mobilisée | 1918 |
6 | Bécassine chez les Turcs | 1919 |
7 | Les Cent Métiers de Bécassine | 1920 |
8 | Bécassine voyage | 1921 |
- | L'Alphabet de Bécassine | 1921 |
9 | Bécassine nourrice | 1922 |
10 | Bécassine alpiniste | 1923 |
11 | Les Bonnes Idées de Bécassine | 1924 |
12 | Bécassine au Pays Basque | 1925 |
13 | Bécassine, son oncle et leurs amis | 1926 |
14 | L'automobile de Bécassine | 1927 |
- | Les Chansons de Bécassine | 1927 |
15 | Bécassine au pensionnat | 1928 |
- | Bécassine maîtresse d'école | 1929 |
N. | Titre | An album |
16 | Bécassine en aéroplane | 1930 |
17 | Bécassine fait du scoutisme | 1931 |
18 | Bécassine aux bains de mer | 1932 |
19 | Bécassine dans la neige | 1933 |
20 | Bécassine prend des pensionnaires | 1934 |
21 | Bécassine à Clocher-les-Bécasses | 1935 |
22 | Bécassine en croisière | 1936 |
23 | Bécassine cherche un emploi | 1937 |
24 | Les mésaventures de Bécassine | 1938 |
25 | Bécassine en roulotte | 1939 |
26 | Les Petits Ennuis de Bécassine | 2005 |
27 | Bécassine au studio | 1992 |
D'autres albums et recueils sont parus après la mort de Pinchon en 1953, notamment une série dessinée par Jean Trubert à partir de 1959.
Pour beaucoup d'entre nous, Bécassine est née dans le coin d'un grenier : cette jeune bretonne est devenue une héroïne intemporelle, qui se transmet de génération en génération, comme une trace du passé, comme un lien avec l'enfance.
Charmante de désuétude et étonnante de modernité, Bécassine demeure un personnage extrêmement attachant, une référence dans le monde de la bande dessinée.
Ô fins d'automne, hivers, printemps trempés de boue,
Endormeuses saisons ! je vous aime et vous loue
D'envelopper ainsi mon coeur et mon cerveau
D'un linceul vaporeux et d'un vague tombeau.
Dans cette grande plaine où l'autan froid se joue,
Où par les longues nuits la girouette s'enroue,
Mon âme mieux qu'au temps du tiède renouveau
Ouvrira largement ses ailes de corbeau.
Rien n'est plus doux au coeur plein de choses funèbres,
Et sur qui dès longtemps descendent les frimas,
Ô blafardes saisons, reines de nos climats,
Que l'aspect permanent de vos pâles ténèbres,
- Si ce n'est, par un soir sans lune, deux à deux,
D'endormir la douleur sur un lit hasardeux.
Baudelaire
Commentaires
C'est bien triste ce poème comme tous les poèmes de Baudelaire. Je t'embrasse, ma Dame
.
Bravo, voilà un article très complet sur Bécassine.Il m'a rappelé les belles lectures de mon enfance.
Bonne soirée.
Bisous.
Becassine, la bande dessinée de ma petite enfance....Merci de nous le rappeler....Passe une bonne fin de soirée....
Jakin,
gros bisous cathy comment vas tu ici la pluie est arriver cet aprem alors je vais faire comme mes chats je vais squatter la cheminée mdrr a bientot nala
haa bécasine de générations sa a bercer biss a toi ma douce a++
kikou viens te souhaiter un bon après-midi gros bizzzous
bonjour, un petit coucou, moi aussi je suis tres occupé en ce moment.